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Une femme travaille sur la table de sa cuisine en présence de son chien guide.Quand le monde du travail s’ouvre au chien guide

Face aux défis de l’inclusion, les entreprises redéfinissent leur rapport au handicap. À l’occasion de la Semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées (SEEPH), l’accessibilité ne se limite plus aux aménagements matériels : elle touche aussi la culture managériale, le regard sur la différence et la qualité de vie au travail. Dans cette évolution, le chien guide trouve naturellement sa place. Repère, soutien, médiateur social, il incarne l’autonomie et transforme le quotidien professionnel. Dans les bureaux, les open spaces ou les services publics, sa présence favorise un mode de travail bienveillant et collaboratif. 

« Un chien dans un tribunal, c’est assez insolite ! » sourit Julie Bouchard, juriste au tribunal de Versailles, accompagnée d’Ulysse depuis un an. « Je n’ai jamais eu autant de gens qui me parlaient. » Par son comportement seul, le chien guide apaise, crée du lien et invite à la conversation. Il rappelle aussi que chaque binôme repose sur une chaîne invisible mais essentielle : éducateurs, familles d’accueil, formateurs, donateurs… Un collectif solidaire qui rend l’autonomie possible.

Regards croisés… quand le chien fédère l’équipe

Du tribunal de Versailles aux serres provençales, la présence d’un chien guide intrigue, fait sourire, interroge… mais surtout, elle rassemble. Julie raconte : « On a pris le même rythme. Il fait partie du quotidien, comme un collègue à part entière. Il a été accueilli avec enthousiasme. » Même constat à plusieurs centaines de kilomètres de là pour Carla Petit, 23 ans, technicienne agronome chez Agrosemens. À ses côtés, Liska, sa chienne guide, est devenue un repère essentiel : « Elle connaît les chemins, les bâtiments, les trajets de bus…
En deux jours, elle avait tout retenu ! »

Au bureau comme sur le terrain, le chien crée du lien et redéfinit les dynamiques d’équipe. « Mes collègues ont été très à l’écoute. On a appris ensemble à s’organiser, à se comprendre », poursuit Carla. Pour ces professionnelles, le chien guide agit comme un pont entre les univers, un partenaire qui cristallise les valeurs d’entraide et d’intégration.
Jean-Baptiste Bourguoin, ancien manager en situation de handicap, garde un souvenir ému de sa première expérience d’équipe avec un collaborateur famille d’accueil et
son jeune chien en formation, Okai. « Au début, je me suis demandé ce qu’un chien allait faire au bureau… Et j’ai découvert un formidable levier humain. »

Rapidement, la présence du chien change l’ambiance : les échanges s’intensifient, les barrières tombent. « On était même déçus quand il venait sans chien ! » Pour Jean-Baptiste, le chien est devenu un révélateur d’intelligence collective : « Il a été au sein de l’équipe un vecteur d’animation et de coordination. » Sa simple présence a facilité les échanges, réduit les tensions, rassemblé les énergies. Derrière ces histoires de cohésion et de confiance, il y a aussi un autre apprentissage, plus discret… celui du chien lui-même. Car dans le monde du travail, lui aussi observe, écoute, s’ajuste — jusqu’à devenir un collègue silencieux, mais essentiel.

Le rapport du chien au travail

Dans un bureau calme ou une ferme animée, le chien guide observe, apprend, s’ajuste. Chaque lieu a ses codes, mais partout, il s’adapte. Carla le confirme : « Mon travail ne permet pas un guidage classique, mais l’aide de Liska va bien au-delà du harnais. » Entre le siège et les serres, Liska connaît chaque trajet, évite les cultures, distingue les chemins.
« Elle sait où marcher et où ne pas marcher », sourit Carla. L’entreprise a soutenu cette intégration : signalétique, braille, repérage au sol… « J’ai trouvé un vrai appui de ma direction et de mes collègues. » Même constat au tribunal de Versailles, après la surprise des premiers jours, le respect s’installe. Julie insiste cependant, la sensibilisation reste primordiale : « Quand il a le harnais, il ne faut pas le toucher ni le déconcentrer, c’est important pour qu’il reste concentré. »

Jean-Baptiste se souvient aussi de l’effet immédiat du jeune chien en formation accueilli dans son équipe : « On sentait que l’atmosphère se calmait dès qu’il entrait dans la pièce. »
Le chien guide sert d’ancrage, inspire confiance et cohésion. Pour ses maîtres, la complémentarité est évidente : gestes plus fluides, déplacements plus sûrs, concentration
accrue. Discrets mais essentiels, les chiens guides harmonisent le collectif — la performance passe aussi par la présence d’un partenaire attentif et calme. « Je salue l’adaptabilité de
ma chienne et sa capacité à être en soutien, quelle que soit la situation », souligne Carla.

Accompagner, former, insérer : le rôle clé du Centre Paul Corteville

À Roncq, le Centre Paul Corteville – pionnier du chien guide en France – a ouvert un pôle d’accompagnement vers l’emploi. Depuis 2024, un pôle de formation et de rééducation fonctionnelle accompagne les bénéficiaires vers l’emploi et l’autonomie retrouvée. « Notre objectif, c’est de redonner confiance », explique Adrien Biadala, responsable du dispositif. « Beaucoup ont les compétences, mais doutent encore de leur capacité à les mobiliser. »

Bilan, formation numérique, locomotion, gestes du quotidien… ici, chaque étape renforce l’autonomie. « On reprend les bases. Savoir utiliser un ordinateur, un clavier, un lecteur d’écran… puis on avance vers la formation métier », précise Adrien. Le centre mise aussi sur la sensibilisation des employeurs et la collaboration avec les acteurs du recrutement. Cet accompagnement est souvent renforcé par des dispositifs institutionnels, comme le souligne Carla : « J’ai été accompagnée par Capemploi pour monter des dossiers de financement de matériel adapté, notamment via l’Agefiph. »

Derrière chaque réussite, une réalité demeure : sans solidarité, rien ne serait possible. « Si un maillon manque (donateurs, éducateurs, familles d’accueil, bénévoles), l’accompagnement s’en trouve fragilisé. » La chaîne de solidarité, c’est ce qui fait battre le coeur de l’association. Chaque don contribue à financer la formation des chiens guides, mais aussi l’accompagnement global vers l’emploi. « Pour les bénéficiaires, le coût est nul ou quasi nul », souligne Adrien.

Travailler autrement, grâce à la solidarité

Juriste, manager ou technicienne agricole, Julie, Jean-Baptiste et Carla partagent une certitude : le chien guide change la manière de travailler. Il apaise, crée du lien, renforce la confiance. Dans les bureaux comme dans les champs, il incarne une inclusion concrète, vécue, partagée. « Il m’a rendu plus humaniste. » précise Jean-Baptiste. Derrière chaque binôme, il y a une chaîne invisible. Familles d’accueil, éducateurs, formateurs, donateurs, entreprises… tous rendent l’autonomie possible. Grâce à eux, l’autonomie devient possible, et l’emploi accessible. Soutenir la formation d’un chien guide, c’est bien plus qu’aider une personne à se déplacer. C’est lui offrir la liberté de vivre, de travailler, de s’insérer pleinement dans la société. Et c’est, pour chacun de nous, une façon concrète de faire entrer la solidarité dans nos entreprises comme dans nos vies.


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