Interview croisée : 20 ans après la loi du 11 février 2005, où en est l’accessibilité pour les personnes déficientes visuelles ?

À l’occasion des 20 ans de la loi du 11 février 2005, nous avons interrogé Michel Rossetti, Président de la Fédération Française des Associations de Chiens Guides d’Aveugles (FFAC), et Dominique Latgé, Présidente de l’ANM’Chiens Guides. Deux maîtres de chiens guides et représentants associatifs qui reviennent sur les avancées permises par cette loi majeure, les défis qui subsistent et les espoirs pour l’avenir des personnes déficientes visuelles.

 

Pouvez-vous rappeler le contexte dans lequel cette loi a été créée et les attentes des associations à l’époque ?

Michel Rossetti : En 1975, la première loi française sur le handicap s’était concentrée, à juste titre, sur les handicaps moteurs, les mieux organisés et les plus visibles à l’époque. Mais 30 ans plus tard, il était urgent de prendre en compte tous les types de handicaps, y compris sensoriels et psychiques. La loi de 2005 a marqué une évolution significative, en mettant l’accent sur la citoyenneté des personnes en situation de handicap et leur place dans la société.

Dominique Latgé : Cette loi visait à garantir l’égalité des droits et des chances, notamment à travers des mesures sur l’accessibilité universelle, l’emploi et la scolarisation. Les associations attendaient une reconnaissance des spécificités de chaque handicap et des prestations adaptées, comme la Prestation de Compensation du Handicap (PCH), qui a permis de mieux répondre aux besoins des personnes, y compris ceux liés aux chiens guides.

 

Quelles ont été les avancées majeures depuis la promulgation de cette loi ?

Dominique Latgé : L’extension des droits d’accès des chiens guides à tous les lieux publics a été un pas décisif. De plus, la reconnaissance légale des chiens d’assistance pour d’autres handicaps est une évolution importante.

Michel Rossetti : La création de la PCH, avec son volet aide animalière, a été une avancée significative. Cela reconnaît le chien guide comme une véritable compensation du handicap, au même titre que les aides techniques ou humaines. Sur le plan de l’accessibilité, des progrès ont été faits avec les bandes podotactiles, la sonorisation des feux de signalisation et des véhicules. Mais beaucoup reste à faire.

 

Quels défis restent à relever pour les personnes déficientes visuelles ?

Michel Rossetti : L’application des règles reste problématique. Beaucoup de lieux publics ne respectent pas encore les normes, malgré les Agendas d’Accessibilité Programmée (ADAP). Quant à l’aide animalière, son montant reste figé à 50 €, alors qu’il faudrait au moins 110 € pour couvrir les besoins essentiels.

Dominique Latgé : La méconnaissance du droit d’accès des familles d’accueil est également un problème. Malgré une extension en 2014, certaines entreprises ou lieux publics continuent de refuser l’entrée des chiots en éducation. Nous devons encore intensifier la sensibilisation.

 

Comment vos associations contribuent elles à faire avancer ces droits ?

Dominique Latgé : Nous jouons un rôle de veille et d’intermédiation avec les pouvoirs publics. Nous sensibilisons les entreprises et les institutions sur les enjeux d’accessibilité.

Michel Rossetti : La création de l’Observatoire de l’Accessibilité des Chiens Guides (OBAC) en 2014 est une de nos initiatives. Nous militons aussi pour une reconnaissance juridique renforcée du chien guide, afin de lutter contre les discriminations comme les refus d’accès.

 

Quels sont vos espoirs pour les années à venir ?

Michel Rossetti : Si j’avais un rêve… Ce serait que dans le quotidien on n’ait plus à se poser de questions sur le libre accès du chien. Ce serait aussi que nos structures soient encore plus efficaces et offrent davantage de chiens car ils restent le meilleur vecteur d’autonomie en matière de déplacement.

Dominique Latgé : Je rêve d’une France où les chiens guides et leurs maîtres évoluent sans entraves, dans une société qui valorise pleinement leur contribution. Je suis convaincue que des réformes audacieuses et un engagement collectif rendront cela possible. Ensemble, nous pouvons construire cet avenir.

 

Un dernier message pour inciter le grand public à soutenir vos associations ?

Michel Rossetti : Sans les donateurs et les bénévoles, nous ne pourrions pas former ces chiens qui changent des vies. Merci à eux pour leur soutien, et j’espère qu’ils continueront à croire en notre mission. Ensemble, écrivons la suite de cette belle histoire.

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